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L’histoire du quartier chalets-Roquelaine

Jean-Phillipe, Commissaire

Nous avons vécu de façon un peu estompée le procès Papon (1998) : Bordeaux n’est pas si loin mais le temps a passé ; et puis on y a dit qu’il n’était probablement pas simple pour un fonctionnaire de prendre clairement position.

Raison de plus pour saluer le courage et la détermination exemplaires dont fit preuve le commissaire Jean Phillipe au mois de janvier 1943. Il était plus spécialement chargé du 7ème arrondissement de police de Toulouse (Saint-Cyprien).

Les Archives Départementales de la Haute-Garonne ont publié un fascicule dont sont extraits lettre et rapport ci-dessous :

Le compte rendu de l’affaire, adressé à Vichy, signé du préfet régional de Toulouse Cheneaux de Leyritz, indique :

«…L’Intendant régional de police [Danglade] prévenait aussitôt, par téléphone, M. le Directeur Général adjoint qui lui notifiait révocation de Philippe avec recherches immédiates et internement de l’intéressé ».

Philippe a d’abord été recherché à Lourdes où il était allé le 13 janvier pour voir sa femme et sa fille adoptive qui s’y trouvaient.

« Madame Philippe, interrogée, déclara ignorer totalement où était son mari et quelles étaient ses intentions.

Le 16 janvier, le commissaire Dedieu effectuait au domicile de Philippe, 22 rue Leyde à Toulouse [maintenant rue du Commissaire Philippe], une perquisition qui demeurait sans résultat…

Le dimanche 31 janvier, à 8 h 30 du matin, le chef de la sûreté allemande, le capitaine Retzek, téléphonait à l’intendant de police qu’il avait fait procéder dans la nuit, à Beaumont de Lomagne (Tarn et Garonne) à l’arrestation de Philippe, et que ce dernier, transféré à Toulouse, arriverait à ses bureaux dans la matinée vers 11 heures… [Philippe était] accusé d’espionnage contre l’armée allemande…

48 heures auparavant, la sûreté allemande avait pu, à Toulouse, sur instruction de ses services de Paris, arrêter un israélite strasbourgeois, ingénieur, répondant au nom de Damm, et trouvait à son domicile un courrier très important de renseignements divers, renseignements militaires, renseignements sur le stationnement des troupes, renseignements sur les réserves d’essence, prouvant très nettement les occupations auxquelles se livraient ce Damm, inconnu de notre police.

Dans ce dossier était une fiche en carton, petit format, donnant l’adresse de Philippe à Beaumont de Lomagne, avec le mot de passe permettant de le toucher, alors que déjà la radio de Londres avait diffusé, pour brouiller les pistes, la bonne arrivée de Philippe à Londres, et en avait rendu compte.

La Collusion entre Philippe et Damm est très nette, les renseignements recueillis … étant à peu près tous de décembre 42 et janvier 1943…»

Jean Philippe ("Basset") - Musée de la Résistance

Philippe reste entre les mains des Allemands qui l’envoient à Paris, puis à Fribourg où il est condamné à mort par un tribunal militaire en mars 1944, et exécuté à Karlsruhe le 1er avril 44.

Dans son livre Toulouse 1940-1944 (Perrin), Jean Estèbe étudie les réseaux de résistants. II indique notamment que le grand réseau Alliance était proche des services britanniques. « Spécialisé dans le renseignement militaire, le réseau s’implanta fortement à Toulouse. Son responsable local fut un temps le commissaire Philippe, radical et franc-maçon…»

Jean Estèbe signale plus loin dans un chapitre consacré à l’après Libération, que « certains responsables majeurs de l’administration n’ont subi aucune peine judiciaire… Ainsi, les deux préfets régionaux successifs, Cheneaux de Leyritz et Sadon, ne passèrent pas en jugement. Certes, ils furent révoqués. Cheneaux s’enfuit d’abord en Espagne puis fit une seconde carrière dans les affaires… Les deux hommes…restèrent en liberté. » Sans commentaire.

Les collègues de Jean Philippe, qui lui trouvaient souvent un air rêveur, l’appelaient parfois Jean de la Lune, Chapeau, Jean de la Lune!

A. Roy

Extrait de la Gazette N°13 – Printemps 1998

Pour en savoir plus :

La maison, autrefois habitée par le Commissaire et sa femme, a brulé en partie le 22 janvier vers 9h30. Voici notre point de vue sur la situation.

Voir les fiches sur Wikipedia de:
Jean Philippe
Julie Jeanne Bouillane

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